Zaho, de son vrai nom Zahera Darabid, est une chanteuse de RnB canadienne d'origine algérienne. Après avoir sorti Hey Papi quelques années auparavant, le succès de son single C'est chelou en 2008 lui permet de gagner une notoriété grandissante. Ne cessant de gravir les échelons, Zaho est reconnue comme l'une des artistes les plus influentes de son époque, avec un univers musical très vaste, qui la définit.
Depuis sa naissance en Algérie où elle a vécu jusqu’à l’âge de 18 ans, Zaho a pu mesurer la difficulté d’avoir des rêves et une sensibilité artistique. Zaho a grandi à Alger, dans un quartier populaire. Inscrite par son père à des cours de musique, elle apprend la guitare à 7 ans.
Dans un monde en furie, lorsque les jours sont noirs de deuil et de cendre, la musique supplante la chorale des mitrailles et le chahut des rancœurs pour nous soustraire à l’arbitraire de l’adversité. L’espace d’une chanson, nous recouvrons un soupçon d’éclaircie dans la noirceur des hommes et nous nous surprenons à rêver. J’essaye d’imaginer le monde sans musique et je n’arrive pas à le concevoir autrement qu’un territoire mortifère. Car, c’est par la musique que toute chose se réconcilie avec elle-même. Zaho est une voix qui s’insurge contre la cacophonie du malheur. Elle surgit parmi les dissonances pour nous venger de ce qui nous déplaît et nous désespère. Elle est ce pouls qui régule ou cadence la marche triomphante du don de soi, la quête inflexible des instants heureux. C’est ma fille cadette, fan inconditionnelle, qui m’a fait écouter Zaho. Nous étions sur l’autoroute flambant neuve qui relie Alger à Oran. Le soleil se donnait en spectacle, exubérant, voire en transe. La petite main de ma fille a glissé un CD dans le lecteur et, d’un coup, l’été alentour s’est mis à festoyer. Zaho est une fête à elle seule.
Sa voix rebelle convoque les étoiles en plein jour afin de conjurer nos vieux démons. J’ai écouté, et j’ai aimé ; j’ai aimé la fraîcheur de cette belle femme réfractaire aux stéréotypes, toujours créative et plurielle, allant d’un ton à l’autre avec aisance, puisant dans ses tripes l’énergie flamboyante de sa générosité.
Zaho s’amuse et nous apaise. Pareille à une abeille, elle butine dans son Jardin d’Eden pour faire d’un hiver un printemps. Chez elle, l’amour est une question de mentalité ; il suffit d’y croire pour le réinventer partout où l’âme s’égare et doute. Chez elle, l’Autre est une nécessité absolue qu’il faudrait convoquer, interpeller, solliciter et inviter au partage.
Dans son nouvel album « Contagieuse », Zaho exulte. Sa voix se veut un appel à l’évasion, à l’exorcisation du sort et à la reconquête de ces petits instants de bonheur que l’on a tendance à perdre de vue. De «Boloss» à «Quelqu’un d’autre», de «Tourner la page» à «Imagine», Zaho pourchasse les interrogations quotidiennes pour leur donner un sens, une raison, une réponse toute simple faite d’espoir et de courage. Telle une gazelle éprise de sa liberté, elle parsème son parcours d’oasis rassérénées et l’on se surprend à vouloir pour soi toutes les quiétudes du monde.
Je n’ai pas vu passer le temps.
Peut-être écoutait-il, lui aussi, chanter Zaho. N’est-ce pas ainsi que survivait Nazish l’Afghan parmi les décombres et le fantôme des époques bénies? Oui, Nazish, on mange pour ne pas mourir de faim et on chante pour s’entendre vivre. Sur cette autoroute écrasée de soleil, j’ai lu dans les yeux de ma cadette que rien n’est tout à fait perdu, qu’il existe sur notre terre des êtres de lumière en mesure de transformer la Vallée des ténèbres en piste de danse. Zaho est de ces êtres-là. Elle est le chant rédempteur de nos infortunes, le chant qui nous rajeunit et qui résonne en nous comme le refus de céder aux soucis notre part d’insouciance.
Yasmina Khadra - Yasmina Khadra est né en Algérie en 1955. Traduit dans plus de 40 pays, il est l’auteur de "l’Attentat", "Les Hirondelles de Kaboul", "Ce que le jour doit à la nuit", et plus d’une vingtaine d’ouvrages qui connaît un succès mondial