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S’il est toujours attaché à ses origines, le rappeur s’en est largement affranchi depuis. Avec Soleil d’hiver, projet réalisé conjointement avec Hologram Lo’ (Dj et producteur au sein du groupe 1995) en 2013, il signifiait son envie de sortir du carcan purement rap dans lequel il avait débuté pour commencer à se frotter à d’autres univers. Des envies d’ailleurs confirmées sur les projets suivants : A l’abri et surtout Bleu Noir, ce fameux premier album solo que Georgio a livré l’année dernière. Dessus, il s’essayait au chant et mâtinait ses textes bruts d’incursions pop, lorgnant même avec brio du côté de la chanson française. Un Georgio nouveau qui s’était révélé lors des tournées et des festivals, que ce soit en solo ou en première partie de Fauve. Comme si, à la rencontre de son public, il avait fini d’exorciser ses démons, était parvenu à mettre la mélancolie qui le caractérisait de côté et s’était découvert un nouveau talent pour les morceaux fédérateurs.
Si Bleu Noir était la première pierre de cette démarche, Héra en est la remarquable suite. Aux côtés de Angelo Foley, collaborateur régulier de Christine & The Queens qui est très présent à la production du disque, Georgio a réalisé un album capable de ravir autant un auditeur de Feu ! Chatterton qu’un nostalgique du rap hexagonal de la fin des années 90. Surtout, derrière l’artiste, c’est l’homme qui a évolué. L’adolescent aux pensées sombres et torturées de Mon Prisme a laissé place à un jeune adulte beaucoup plus positif. Tout au long de Héra, de la première piste « L’espoir meurt en dernier » au titre caché de la fin du disque, Georgio se montre combatif (« On s’accroche » scande-t-il sur « Du bout de mes dix doigts »), déborde d’ambition (« La Terre je la dévore ») et chante l’amour avec un grand sourire (le morceau « Héra » qui renvoie à la divinité grecque, déesse du mariage). « Si vous croisez mon ex-moi, vous pouvez l’étrangler, je ne peux pas croire qu’il ait existé » rappe-t-il sur «Ici-Bas », lui qui dit vouloir arrêter « d’idéaliser l’obscurité » (« J’arrête »). Plus complet que dans le passé, il est aujourd’hui autant à l’aise dans le storytelling (le poignant « Mama Rita ») que dans le registre de la chanson contestatrice (« No Future », digne suite à « Appel à la révolte »).
Si la carrière de Georgio était un film, elle serait probablement une de ces comédies américaines douces-amères où le personnage principal est l’anti-héros dont on aime observer l’évolution. Noyé dans la masse et réservé au début du film, il finit par se révéler au cours de l’histoire et arrive finalement au gala avec la plus jolie fille du campus. Il y a quelques années, lorsque Georgio débutait et qu’on l’associait à tort avec l’Entourage, il n’était peut-être pas celui sur lequel la majorité des observateurs auraient parié. En 2016, il est pourtant l’un de ceux qui s’en est le mieux sorti, capable d’avoir rendu son propos plus accessible sans avoir perdu son ADN de départ. Sur « J’arrête », Georgio émet un souhait fort : « Un jour, je deviendrai un homme heureux et accompli ». A l’écoute de Héra, on se dit qu’il en est clairement sur le chemin.